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Bienvenue !

Bienvenue dans mon cabinet de curiosités, interstice où vous pourrez parcourir de brèves chroniques de mes écoutes, lectures, déambulations et autres découvertes.
Du fond de l'abri, il vous sera possible de suivre mes bidouillages divers…
Enfin, ce blog est aussi un prolongement de mes cours à l'école des beaux-arts (les cités obscures) et à l'université.
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1 février 2006 3 01 /02 /février /2006 15:06
Alors que Christophe Petchanatz m'écrit pour m'avertir qu'il a relayé la dernière newsletter des éditions cactus, je me souviens d'un texte écrit par lui il y a bien longtemps, dont le personnage principal était "le jeune alfred". "le jeune alfred" était un personnage simpliste que j'avais créé en 1987, qui apparaissait dans mes deux premiers livres illustrés, puis dans mon journal : "la betterave mystérieuse" dessiné et mis en scène, au fur et à mesure des numéros, par une vingtaine d'auteurs.
Ce journal était une sorte de fanzine, graphzine photocopié et diffusé gratuitement.
Christophe avait eu l'occasion de faire une petite BD du jeune alfred, alors publiée dans la-dite "betterave", et avait par la suite écrit le texte ci-dessous, que j'avais découvert il y a quelques années en parcourant son site web.



Épîtres
Christophe Petchanatz.

à Thierry Weyd

Le jeune Alfred en lettres  rouges (ombre très noire, sèche, buvard) — le jeune Alfred écrit, gravé  dans le ciel fade du Calvados : constructions pâtissières aux perspectives à peine  supportables et là, posées sur une table, denrées avec lesquelles on nous persécuta  des années durant, avant que ses parents divorcent et qu’il put imposer sa LOI, aliments mous alvéolés où se perdre, claquement des drapeaux au-dessus des  plates-bandes (comme elles sont éloignées ce fut facile à faire : une ligne de  colle, une pincée de pigment). Insolence des pelouses (vu d’aéroplane, le terrain  avoue certaines bizarreries, comme un message inscrit là, pour nous). Sur la nappe très  jaune les légumes très vifs, la viande à l’impudeur presque modeste, alcool dont  on devine la densité (plomb parfumé qui tôt ou tard lestera nostre sang, nos viscères — qui  tôt ou tard molestera les registres de certains échanges dont nous avons la vanité de  penser qu’ils sont de ceux qui nous définiraient). Au dos de ton envoi rien qui  (n’) indique la provenance. J’ai même décollé la partie ajoutée, celle où  il est question du conservateur, du guide, du gardiens [sic], etc. — déçu car  j’espérais découvrir là-dessous quelque message dérouté, betterave, gouache,  self-portrait (?) charbonneux qu’on affuble chaque matin d’un col marin,  d’un seau, d’un râteau et d’une pelle, et qu’on emmène vaille que  vaille jusqu’à ce square dont le gravier, particulièrement aigu, brille  péniblement. Alfred est à chacune des fenêtres, qu’il ouvre, qu’il referme  soigneusement. Pour certaines d’entre elles, il joue au vitrier : un peu de  mastic, un petit clou sans tête... il a horreur que vibre le carreau quand passent les  camions. Alfred s’octroyant le corps principal, les dépendances et la petite  chapelle contiguë, j’habiterai l’aile droite du bâtiment. Dans la cour, et  cela nous écoeure, les aliments ne cessent de grossir. Corps de poulets (comment dire  autrement?) dilatés à l’extrême, moignons épouvantables, marécage  d’épinards mixés sur lesquels nous devons naviguer. Le vin nous a trompés, son  couvercle de cire. On se demande même si l’on pourra tenir (intacts!) jusqu’à  ce mois de juin. Alfred compte les girouettes, les antennes de télé et les  paratonnerres. Alfred compte les fanions, les équipes prévues. Dès qu’il aura  retrouvé son sifflet on pourra y aller. Gigantesques, les aliments emplissent désormais  le ciel et commencent à peser sur les habitations... Si le match avait eu lieu à temps  (les arbustes se soulever et projeter leurs baies multicolores, les récipients avaler  goulûment cet excès, cette épuisante prolifération)... Mais rien, Alfred reste muet,  la main posée sur la bakélite de l’interrupteur général. Il pense à ce  qu’ont dit de lui (ou pensé, ou rêvé) les voyous rencontrés jadis, il y a  peut-être dix ans, ces garçons à qui, anxieusement, il désirait parler — lui  qui n’a su que bafouiller lamentablement. Ils n’ont même pas daigné le  regarder. Et aujourd’hui : vengeance.



Vous pouvez lire d'autres textes de Christophe Petchanatz, et aussi des textes de Lucien Suel, Bruno Richard, Jean-Pierre Bobillot et d'autres auteurs encore, sur le site suivant www.homme-moderne.org

Christophe Petchanatz est aussi renommé, depuis une bonne vingtaine d'années, pour sa création musicale sous le pseudonyme de Klimperey.
Klimperey c'est une musique abondante, légère, lancinante, petillante, drôle, triste, ce sont des rengaines enfantines et parfois tragiques dont je vous recommande l'écoute.

web : http://klimperei.free.fr
blog : http://klimperei.over-blog.com
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